"Timocratie" ou "Théâtrocratie" ?
Platon
Le mot se trouve chez Platon (Rep. 545.B) : « timocratie », soit le régime où commandent ceux qui recherchent les honneurs (timè, en grec, signifie « honneur »); il y a une autre création platonicienne: « théâtrocratie », régime de ceux qui se donnent en spectacle, qui se croient compétents sur tout, sans rien avoir appris, que cela soit au théâtre ou dans les autres domaines; les auteurs de cette déviance jouent à ceux qui savent et se croient au-dessus des lois et des serments (Lois III, 701 A.D).
N'est-ce pas une définition idoine du régime qui s'exhibe sous nos yeux ?
Un système qui fonctionne en actes, scènes, tous en rebondissements imprévus, suspense, effets de manche mises en scène savamment débitées par des conseillers ad hoc, fils de pub de père en filles.
Et, à y voir de plus près, c'est tout l'art de gouverner: nous tenir en haleine !
Voyez le sarko-show, machine parfaitement huilée, la vedette connaît son texte jusqu'au bout des doigts en comptant les ongles et, reconnaissons-le, il est très bon dans son rôle, la preuve: il gagne les élections ! Le problème, c'est qu'il nous remet toujours le même couvert, à la longue cela devient nauséeux et, ces derniers temps, fatigue de l'acteur, sa métamorphose en modeste dirigeant à l'écoute de ses administrés, sonne faux, il y a comme du chiqué qui transparaît au bout de ses interventions...
Les autres, c'est pareil. Obama est très bon aussi, plus glamour que lui tu meurs ! Et Blair ? Vous l'avez vu devant la commission d'enquête sur la guerre en Irak ? Tout bronzé, sourire Pepsodent, look Playboy qui se la joue modeste, posant avec le professionnalisme d'un habitué des défilés ! Pas étonnant qu'il ait grugé son monde durant toutes ces années.
Même cette Madame Merkel, si pénétrée de « deutsche Ordnung », qui excelle en parangon du sérieux germanique; elle doit y passer, on sent bien que ce n'est pas sa tasse de thé, mais elle se force et, persévérante comme elle est, y arrive !
Voyez de Villepin et Sarkozy: Shakespeare ou Labiche ? vous avez le choix... vous préférez Goldoni ? Comme vous voulez !
Le nombre de conseillers en « communication », de « relookeurs », de spécialistes de ces techniques crypto-ésotériques dont les hommes de théâtre, politique ou non, font leur quotidien...absolument édifiant. Et les frais de « représentation », si justement nommés ? Astronomiques !
Et puis dans notre petite vie à nous, obscurs et sans grades, « on » veut nous déguiser, nous affubler d'oripeaux griffés, de montres et d'accessoires ad hoc, ce qui vide nos poches pour remplir les leurs, mais c'est pas tout; « on » veut nous faire repousser les cheveux, corriger les seins, aplatir le ventre, redresser le nez et ragaillardir la zigounette, rien de moins s'il vous plaît ! Et il y en a des tas (et des tasses !) qui jouent le jeu et s'y croient malins.
Mais, me rétorquerez-vous, après tout la vie est une tragi-comédie, et le divin Shakespeare n'a-t-il pas écrit que la vie est un théâtre ? Alors de quoi vous plaignez vous sacré Ali ?
Je suis tout-à-fait d'accord avec ce grand dramaturge, mais au moins, vivez votre propre rôle et pas celui que les uns et les autres veulent vous voir jouer. Soyez vous-mêmes ! Si vous êtes vous-mêmes, vous vous connaîtrez-vous mêmes et vous connaîtrez les dieux (et les déesses) comme il était écrit sur le fronton du temple de Delphes.
Voilà qui, en passant, fera plaisir à Socrate.
Voilà qui, en passant, fera plaisir à Socrate.