Le Coran et les shî'ites

Publié le par Ali

 
 

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Le Coran est la parole de Dieu, nous sommes tous unanime sur ce point.

Il faut cependant nuancer légèrement cette sentence : le Coran est la parole de Dieu exprimée en mots par des hommes.

Expliquons-nous :

La parole est l'expression du mot ou, si l'on préfère, le mot est la stratification de la parole. La parole est enfouie sous le mot qui l'exprime.

Le propre du croyant est donc de retrouver, sous ou par-delà le mot, la parole.

Le mot est le fruit de l'arbre, la parole en est le suc.

Les shî'ites croient que les mots qui traduisent la parole ne suffisent pas à eux seuls à exprimer la volonté claire et juste du Créateur, il faut, en plus, un effort d'interprétation, d'exégèse qu'ils expriment sous le vocable « ijtihad ».

Cet effort, c'est le propre de ceux qui sont habilités à le faire, soit les lettrés, ceux qui ont un pouvoir reconnu pour aller au-delà du mot et retrouver le Verbe : les « mujtahid »

Ces derniers, chez les shî'ites, vont donner et développer leur exégèse, ils en sont responsables. Cette exégèse vaut ce qu'elle vaut, le temps qu'elle vaut. Elle ne fait pas toujours jurisprudence, elle peut être interprètée par une exégèse ultérieure voire tout simplement abandonnée  sinon condamnée.

J'ajouterai que cet effort (ijtihad) ne doit pas seulement être le domaine réservé de ceux qui sont censés pouvoir le faire. Tout croyant a pour mission de s'impliquer dans le texte, de s'interroger, de trouver par lui-même des réponses qu'il pourra, en toute humilité, proposer pour examen à ses frères et sœurs.

C'est ce perpétuel effort qui rend la religion vivante.

Si nous considérons en quelques lignes l'histoire des religions, que constatons-nous sinon que le danger mortel qui les guette est précisément la paralysie dogmatique.

Voyez le judaïsme : passée la période des Prophètes, il s'est stratifié dans les tours et contours de la Loi qu'il a d'abondance et avec une acuité tout-à-fait profane commentée et amplifiée.

Le christianisme s'est paralysé autour de questions étrangères à l'Evangile, soit des considérations de théologie politique autour de la personne du Pape et des Conciles et, du côté des réformés, une anarchie dans l'exégèse des textes, conséquence d'un dogme suspect qui implique eo ipso l'influence de l'Esprit Saint dans le chef de celui qui interprète.

La lecture « littérale » du Coran conduira, à terme, à ce même type de déviance.

Souvent, nous entendons des phrases du type : l'islam est incapable de s'adapter au monde moderne.

L'ijtihad est précisément cette réponse que le musulman engagé dans le monde tel qu'il est doit donner à cette interrogation.

Si tant est que sa foi doive « obligatoirement » s'adapter à ce monde et à tout prix...


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